Wacht im Jura (Garde dans le Jura)
Charles l'Eplattenier, l'amour des montagnes et l'iconoclasme de la gauche.
On se connaît un peu, maintenant, même si je suis là depuis le début, mais laissez-moi encore vous parler de mon canton. Malgré un positionnement fortement à gauche (pour l'instant), comme beaucoup de terres séparatistes (Bretagne, Catalogne, Irlande), il se trouve que nous fûmes un pays séparé de la Suisse, de 1032 à 1792 (la Principauté épiscopale de Bâle), puis une éphémère république « soeur » de la Gueuse, un département français jusqu'en 1815, date à laquelle, à la suite du congrès de Vienne, nous fûmes offerts au canton de Berne, situation qui durera jusqu'en 1974, année de création du canton du Jura. Et comme la Bretagne, la Catalogne, la Corse, l'Irlande, l'Alsace, etc, notre régionalisme (d'aucuns pourraient le voir comme un nationalisme) est truffé de cuistres d'extrême gauche.
On parlera un autre jour du marasme dans lequel le canton se trouve alors qu'il n'a pas 50 ans mais pour l'heure, vous vous demandez sûrement pourquoi je vous parle histoire et politique dans un article sur le patrimoine ? J'y reviendrai plus tard mais pour le moment, remontons donc un peu le temps et la crète du Jura et parlons un peu d'un artiste que j'apprécie beaucoup, Charles L'Eplattenier.
Né le 9 octobre 1874 à Neuchâtel et mort le 7 juin 1946 aux Brenets, Charles l'Eplatennier est un artiste peintre, sculpteur, architecte et décorateur suisse, promoteur de l'Art nouveau dans la région neuchâteloise.
Fils d'une famille paysanne, il entre en 1887 en apprentissage chez un peintre en bâtiment à Peseux. Durant son apprentissage, il prend également des cours de dessin auprès de l'aquarelliste Paul Bouvier, installé à Neuchâtel.
Compétent et passionné, il est envoyé à Budapest où il fréquente l'école d'art décoratif de 1890 à 1893. Détenteur d'une bourse du canton de Neuchâtel, il se rend ensuite à Paris où il suit les cours de l'école nationale supérieure des beaux-arts dans l'atelier de Luc-Olivier Merson pendant trois ans.
Portraitiste de talent, il en commettra beaucoup, dont quelques autoportraits, tels que présentés plus haut.
À son retour, il est appelé comme professeur de dessin et de composition décorative à l'école des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds, dont il assumera la direction entre 1903 et 1914. Il y crée en 1905 un « cours supérieur », programme par lequel il importe les fondements théoriques de l'Art nouveau international et les adapte au climat local pour créer le Style sapin.
C'est en effet un des monstres sacrés du graphisme suisse, spécialement romand. Il donnera ses lettres de noblesse à l'école d'art de La Chaux-de-Fonds. Pour connaître personnellement quel type « d'artiste » celle-ci engendre, à notre époque, je peux vous le dire : Dieu, qu'on était mieux avant.
En 1904, il peint Le Mont Racine ou encore Au Sommet et, pour lui, il n'est question ni du fauvisme, ni du cubisme, ni même de Cézanne qui meurt l'année suivante.
Peintre passionné de son terroir, il le dessinera, gravera, peindra avec un égal amour et une égale dextérité.
Il enseignera par la suite à des artistes tels que André Evard, Charles Humbert, l'affichiste Jules Courvoisier, Jeanne Perrochet, Marie-Louise Goering, Henriette Grandjean et Charles-Edouard Jeanneret, le futur Le Corbusier (même si, pour ce dernier, il eût peut-être mieux valu qu'il s'abstienne).
Je ne vous ferai pas l'affront d'une digression sur Jeanneret le cosmopolite, mais peut-être qu'on y viendra...
En attendant, voici quelques gravures et dessins du maître, car le bougre a exploré beaucoup de supports de création, et pour le savoir, nulle n'est meilleure mesure d'un artiste que son trait de crayon. Car oui, L'Eplattenier pense par son crayon, par les fondations, la base, tel l'architecte qu'il voulût être.
Avec certains élèves de ce cours supérieur, rassemblés sous le nom des Ateliers d'art réunis, il décore entre 1909 et 1912 le crématoire de La Chaux-de-Fonds, ainsi que le pavillon Hirsch de l'Observatoire cantonal de Neuchâtel.
Magnifique exemple de décoration religieuse, déjà en deliquescence à l'époque.
Pendant cette période, il mène une double carrière d'artiste et d'enseignant. Il démissionne de l'École d'art en 1914 afin de se consacrer totalement à son travail artistique, réalisant de nombreuses commandes, on imagine, issue de son amour flamboyant de la Patrie (comme vous avez pu le constater).
Malgré son échec à l'École d'art où son cours supérieur a été supprimé suite à l'opposition d'esprits conservateurs, il fait carrière et consacre le dernier tiers de sa vie à représenter le Jura. Charles L'Eplattenier décède en 1946 des suites d'une chute mortelle dans les rochers du Doubs, comme tout amoureux du plateau et du Clos qui se respecte.
Il laisse une oeuvre vaste, bigarrée mais intrinséquement emplie de l'amour de son pays. Ce plateau venteux et ses sapins fiers.
Ça, s'était son « pays réél ». Mais ce bon Charly n'était pas en reste envers la Confédération. En effet, habité d'un vrai esprit patriote et martial (n'oublions pas que la dernière guerre sérieuse pour la Suisse datait des guerres napoléoniennes, avec une petite guerre civile en 1847).
Pourquoi donc vous parlais-je du Jura, me direz-vous ? Et bien, il se trouve qu'à la séparation de deux pans de la chaîne montagneuse du Jura, continuation nord du plateau neuchâtelois, s'érigeait avant une statue sculptée par ce bon Charles.
Nommée « Sentinelle des Rangiers » (du nom du col), les locaux l'appelaient « le Fritz », dans un mélange de fierté de la garde aux frontières menée au Jura pendant la Grande Guerre et de ressentiments envers « le Bernois », incarnation de la fin de notre indépendance, un siècle à peine avant.
Malgré tout, la statue plaisait, elle faisait partie du paysage, elle était un rappel du devoir jurassien effectué. Cela, c'était sans compter la décadence à venir. Dans les années soixante, la Question Jurassienne (à savoir, celle de notre indépendance du fait de notre histoire et notre langue différente du canton de Berne) faisait rage. Mais, d'indépendantistes conservateurs et fiers, les forces vives de cette juste rébellion, pétries de poncifs de gauche soixante-huitardes antimilitaristes et antipatriotiques, commirent l'irréparable, et firent les pires vilénies sur une œuvre d'art et finalement firent tomber cette statue.
Entre le 3 septembre 1962 et le 10 août 1989, elle fut la cible d'attaques répétées par les séparatistes jurassiens, qui aboutirent finalement à sa démolition.
Le 3 septembre 1962, le monument est vandalisé une première fois par le Front de libération jurassien. Celui-ci y peint un écusson jurassien ainsi que le sigle « FLJ ».
Le 30 août 1964, lors de la commémoration des 25 ans de la mobilisation de l'armée suisse lors de la Seconde Guerre mondiale et des 50 ans de la Première Guerre mondiale, environ 7'000 séparatistes jurassiens interrompent la cérémonie. Le Conseiller fédéral Paul Chaudet, ministre de l’armée, et Virgile Moine, membre du gouvernement bernois, furent malmenés par la foule, et la cérémonie tourna court.
Plusieurs barbouillages ont lieu sur la statue, notamment en 1971.
Après le plébiscite jurassien, le monument passe dans le canton du Jura dès le 1er janvier 1979.
Dans la nuit du 31 mai au 1er juin 1984, la Sentinelle est renversée et incendiée par le Groupe Bélier. Ce dernier revendique alors, à la place de la statue, « un monument symbolique de la victoire du 23 juin 1974 et du combat pour la réunification ». Le monument original est finalement remis à sa place le 27 juin.
Le 10 août 1989, la Sentinelle est à nouveau renversée par le Groupe Bélier. Cette fois-ci, elle est également décapitée. Des tags écrits « DMF tue » et une croix gammée ont également été peint (c'est vous dire le niveau de réflexion abyssal des abrutis du Bélier, symbolique de celui de la gauche depuis lors).
Dès lors, la Sentinelle est entreposée dans le dépôt des ponts et chaussées à Glovelier, qui est incendié dans la nuit du 24 au 25 février 1990.
Après ces événements, l’École polytechnique fédérale de Zurich publie un rapport, en 1990, concluant que le monument ne pouvait être restauré.
C'est tout un symbole de la putréfaction des mouvements séparatistes jurassiens, passés de vecteurs de nationalisme et de régionalisme légitime à enfants gâtés, iconoclastes, vandales à la petite semaine et gauchistes patentés.
Le pire ? C'est que oui, nous avons récupéré notre pays (plus ou moins), mais ces mouvements ont trahi ce pays et son peuple. Car si les vieux grisons du Bélier et du FLJ se félicitent encore de cette action et sont toujours contents d'avoir « bouté le Bernois hors des Franches », ils ne voient absolument aucun problème à ce qu'il y ait maintenant un kébabier dans presque chaque village, et que leurs fils parlent avec cet accent et ce sabir de la racaille, qu'on retrouve de Marseille jusqu'à Bruxelles, et maintenant dans un petit canton du Nord de la Suisse.
Décadence et traîtrise, mais qu'attendre d'autre d'anciens gauchos antiblancs, libéraux-libertaires, décoloniaux pour tous, sauf pour les pays blancs ?
Comme dit la rime : « Un jour viendra où les traîtres payeront... »